Transmission du savoir : la bouteille de lavande.

14 août 2016

bouteille de lavande lavender bottle
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De mémoire d’enfant, ça a toujours trôné quelque part. Pas spécialement très visible. Et pas seulement chez moi, dans mon armoire. Un peu partout, en Provence. Dans les shops, sur les marchés, sur les charrettes des reconstitutions historiques, dans les villages provençaux, aussi. La bouteille de lavande.

Evidemment que Mamie elle sait les faire. 
Mamie, elle sait toujours tout, et elle sait toujours tout faire. 
Elle l’a appris de sa mère, quand elle était toute petite, juste un peu avant qu’elle ne meure. Puis elle le faisait faire aux enfants, quand elle était monitrice de colonies de vacances, dans les Alpes, en 1952. Alors forcément, elle sait les faire les yeux fermés, les bouteilles de lavande. 

Mamie elle travaille à Notre Dame de la Garde. Y a pas plus grande fierté, pour une marseillaise. Elle gère l’accueil. Et c’est une star. Parce que c’est dans son caractère, d’être là, d’empoigner l’existence, de tout envelopper sauce Mamie, d’être toujours là pour tout.

Au début de l’été, c’est la saison de la lavande en Provence. Et Mamie elle sait y faire. Les sachets, les bouteilles de lavande, pour mettre dans les armoires. Elle a eu l’idée de les faire in situ, à Notre Dame. Ça plait beaucoup aux touristes. Surtout aux asiatiques et aux américains. Les mains de Mamie sont sur beaucoup de photos. Sa tête aussi, mais ça, faut pas trop le lui dire. 

En la regardant faire, j’avais l’impression que c’était une identité toute entière qu’elle portait sur ses épaules, toute seule, au milieu des badauds. Et je me suis projetée dans le futur, où, quand la génération de Mamie aura disparu, le savoir faire provençal authentique aura disparu, les dernières bribes existantes aux les griffes des engins de consommation. 

Alors j’ai voulu apprendre à faire les bouteilles de lavande. A ce qu’il me reste quelque chose de provençal dans l’ADN, utiliser Quézako deux fois par an dans mon vocabulaire, ça suffisait pas. Elle m’a dit de venir chez elle.

Le vigile, à Notre Dame, lui avait ramassé plusieurs kilos de lavande fraiche, qu’il lui a mis dans des cartons. C’est beau, des cartons de lavande. La couleur, l’odeur… Toutes ces tiges, à perte de vue. Il y en a combien ? Des centaines, des milliers ? 

Elle empoigne un grosse masse qu’elle me met dans la main. « Egalise les et fais-en un bouquet. Regarde. »
Ce bouquet, ce sera la base de notre bouteille. Elle utilise le ruban qu’elle trouve. C’est pas toujours du meilleur goût, ses accords de couleurs. Mais les mamies nées dans les années 30, elles s’en foutent. 

On a tressé pendant des heures. Ma première bouteille, elle était moche. Non, tu ne la verras pas sur ce blog. Pendant que je peinais à en tresser une, Mamie elle en tressait trois. Puis, petit à petit, j’ai commencé à prendre le coup de main, et à rattraper son allure. Vers la queue de la bouteille, ça fait mal aux doigts. Mamie elle utilise une aiguille à tricoter pour ne pas trop se noircir les ongles. Elle ne se plaint pas, mais elle commence à avoir mal au dos sur sa chaise. Faut dire qu’elle y est depuis des heures, à tresser des bouteilles de lavande, comme une ouvrière d'usine à la chaîne.

J’ai pas osé lui dire que je comprenais pas pourquoi elle appelait ça « bouteille de lavandes » parce que pour moi, à aucun moment ça ressemble à des bouteilles. Puis j’ai fouillé l’internet et j’ai vu qu’on appelait ça aussi « fuseaux de lavande » ou pire encore, « quenouille de lavande » alors je vais garder l’appellation de Mamie, « bouteille de lavande ». 


DIY 
____

Pour une seule bouteille de lavande, il te faut : 

  • un bouquet de lavande (avec des tiges longues)
  • un mètre (voire un mètre et demi) de ruban (je te conseille des teintes claires)
  • un ciseau
  • une aiguille à tricoter (facultatif)

Etape 1 : Tu fais un bouquet de lavande. Un bouquet quand même un peu épais. Serré, le diamètre des tiges doit être très légèrement inférieur au diamètre d’un bouchon de bouteille d’évian. Il faut que les queues de lavandes soient débarrassées de toutes leurs aspérités. Tu enlèves les petites sous-branches de lavande et le petit feuillage, de manière à ce que les tiges soient lisses. Parce que les tiges, c’est notre base de travail.

Etape 2 : Tu noues ton bouquet de lavande serré, très très serré 2cm au ras des fleurs, avec le ruban que tu as choisi. 

Etape 3 : En plaçant ton pouce 1cm en haut du ruban, côté queue des tiges, tu rabats des branches, une à une, de sortes à ce que les fleurs se retrouvent prisonnières, sous la masse des tiges. 

Etape 4 : C’est parti pour le tressage. Dans le sens de l’écriture, de gauche à droite. On fonctionne par branches, comme des mèches de cheveux. Une branche c’est 5 tiges. Dessus, dessous. Le ruban, on le serre fort. Dessus, dessous. Peu à peu ça prend forme. 

Etape 5 : Une fois arrivé en bas, il va falloir couper, après un premier noeud. La technique de Mamie, c'est d'attacher l'extrémité de ce noeud à un nouveau bout de ruban, d'une trentaine de cm. C'est avec ce bout là que tu peux désormais faire la ganse finale, purement décorative du pied de la bouteille de lavande.  

Astuce : Le secret, c’est de bien serrer le ruban. Mamie elle le tire toujours l’extrémité un peu vers le haut. 

Et voilà comment on tresse des bouteilles de lavande, à la façon des -enfin de la mienne, en tous cas- mamies provençales !
T’as rien pigé et c’est pas très parlant tout ça ? Une vidéo explicative, pas à pas ici


Si tu veux acheter les bouteilles de lavande de Mamie, tu les trouveras à l’accueil, à Notre Dame de la Garde. 

Sache que si tu lui en achètes une, l’argent ira directement à Notre Dame, Mamie ne touchera pas un centime malgré son dur labeur. C’est sa façon à elle de remercier, parce qu’elle n’allume pas souvent des cierges et ne fait jamais d’offrandes.  









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